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MotoGP rêve

Il est temps de parler d’une des plus fortes images de ce week-end ; À la fois magnifique et triste, c’est l’extinction d’un rêve, le désespoir de quitter le cirque MotoGP. Présent dans le parc fermé en tant que premier pilote privé, Fabio Di Giannantonio ne put se contenir face à l’émotion du moment, lui qui quittera sans doute la catégorie reine à la fin de la saison. Analyse plus profonde d’un moment hors du temps.

 

Le MotoGP, un rêve pour tous

 

Je voudrais d’abord commencer par le féliciter, chaleureusement. Fabio Di Giannantonio a été monstrueux sur ce week-end, et pourtant, au vu de l’action concernant les favoris, personne n’en a parlé. Très fort sur son tour qualif, solide durant le Sprint – achevé devant les deux officiels Ducati – et finalement, assez remarquable lors de la course principale. Il prend la quatrième position, ce qui confirme sa progression au long de la saison 2023 même si ses accomplissements ne soutiennent pas la grandeur de Marc Márquez, qui va le remplacer. Bravo.

 

MotoGP rêve

Devant les officiels en Sprint. Une fierté. Photo : Michelin Motorsport

 

Mais pour autant, je ne suis pas là pour évoquer sa performance. Aujourd’hui, j’aimerais parler d’un ton plus grave, essayer de comprendre sa réaction. Lui-même s’est largement étendu sur le sujet (dans un article que vous pouvez retrouver en cliquant ici), mais je pense que son craquage au milieu des meilleurs pilotes du monde est tellement beau.

Beau, car il incarne tout ce qu’il y a de magnifique dans la défaite au plus haut niveau. Fabio Di Giannantonio avait un rêve, devenir pilote en MotoGP, mais n’a pas pu le combler de la manière dont il le désirait. Ces larmes représentaient à la fois la désillusion d’une vie, mais aussi, la fierté d’un dernier exploit avant de s’en aller. Pour être honnête, je ne vois pas comment il pourrait retrouver un guidon au vu du contexte. Selon moi, la seule porte entrouverte se trouve chez LCR si Johann Zarco est envoyé au sein de l’écurie officielle Honda Repsol, mais les chances sont minces. Je n’y crois pas.

 

 

Au moins, il aura montré, pour la deuxième fois en deux ans, qu’il était capable de grandes choses. La moto ; ces héros ne savent faire que ça. Professionnel depuis 17 ans, il n’a jamais rien connu d’autre. Bien sûr, il y a plus grave dans la vie. Il pourra sans doute rebondir dans une autre catégorie, pourquoi pas en Superbike. Mais aucun enfant ne grandit en rêvant de Superbike. Tous veulent faire partie de l’élite, et c’est la mort de ce rêve qui s’est exprimée dans le parc fermé. Il emportera deux beaux souvenirs, oui, Mandalika 2023 et cette pole position surprise au Mugello en 2022, sous la pluie. Mais pour le reste, il a toujours exprimé beaucoup de frustration, de déception, parlant même de santé mentale en 2022, chose que peu osent aborder.

 

Un mythe qui persiste

 

Après la course, il insistait sur un élément en particulier : le travail, stipulant que c’était aussi un gros bosseur, malgré le manque de résultats – de fait. Je ne sais pas exactement d’où ça vient (même si on peut aisément trouver des racines dans l’âme du capitalisme américain), mais cette idée selon laquelle les meilleurs sont ceux qui travaillent le plus doit cesser. Je parle ici uniquement de MotoGP – et plus largement, de sport, cela n’a pas pour but de lancer un débat politique car c’est encore une autre histoire.

Il faut arrêter de nous faire croire que le talent n’est qu’un plus, que seul le travail compte. Je ne doute pas une seule seconde de Di Gia’, je pense que c’est un bosseur. Mais il faut accepter qu’il n’est pas aussi bon que les autres, et ce n’est pas grave ! Ce n’est juste pas de sa faute. Alors, oui, parmi les plus grands de l’histoire, il y en a pour qui c’est plus facile de déceler ce génie dont que j’évoque. Il y a juste à regarder un Marc Márquez dès ses débuts, ou même, durant son passage en Moto2. Il ne fallait pas être un fin connaisseur pour constater qu’il avait « quelque chose en plus », sans dire qu’il ne travaillait pas comme un acharné pour autant.

 

MotoGP rêve

Un pilote honnête. Photo : Michelin Motorsport

 

C’est le cas pour la majorité des plus grands. J’ai l’impression qu’on veut pousser cet argument afin de rassurer les jeunes, en leur disant qu’avec du travail, c’est possible d’y arriver. Y arriver, oui, mais pas au niveau des légendes de sa discipline. De l’autre, cela signifie que ceux qui échouent n’ont juste pas assez travaillé. Et ça tombe bien, parce que vu qu’ils n’y arrivent pas, alors on ne peut pas vérifier. Nier le talent, c’est banaliser l’exceptionnel, c’est retirer toute l’âme du sport. S’il ne s’agissait que de travail, nos héros ne seraient pas si admirables. Non, si vous prenez un gamin de quatre ans et que vous le forcez à piloter, tous les jours, sans relâche, rien ne garantit qu’il sera comme Márquez. En revanche, il peut être comme Fabio Di Giannantonio, et je dis ça sans lui manquer de respect, vous allez comprendre.

L’Italien me sert d’exemple car je persiste à dire qu’on ne peut pas reprocher à un pilote son manque de génie. C’est trop personnel, trop intrinsèque. C’est injuste de discriminer ainsi. C’est aussi pour cette autre raison qu’il pleurait dans le parc fermé ; enfin, tout ces sacrifices, parfois balayés d’un revers de main, pris pour acquis par les journalistes, les fans, et les directeurs d’équipes, payent enfin.

Ce ne sont pas 27 tours qui sont récompensés, mais une vie de travail. Il n’a pas pu faire mieux en deux ans de MotoGP. Et alors ? Qui peut lui dire quoi que ce soit ? Personne. Cela ne signifie pas non plus qu’on ne peut jamais critiquer les pilotes, car je le fait assez régulièrement dans cette rubrique. Mais juste, jamais sur la base de leur talent. Quand c’est une question d’état d’esprit, d’erreurs de pilotage évitables et remarquées par les autres, de QI course, alors, oui, on peut en discuter – d’autant plus quand il s’agit de pilote dont on connaît leurs capacités. Dans le cas présent, Ddi Gia’ n’avait jamais signé de fulgurances en Moto3 comme en Moto2. Mais jamais je ne reprocherai à Fabio Di Giannantonio de ne pas être Marc Márquez.

Je lui souhaite une bonne continuation, car je pense que la vie sourit aux passionnés.

Que pensez-vous de sa situation, et surtout, où le voyez-vous rebondir en 2024 ? Dites-le nous en commentaires !

 

Va-t-il trouver une porte de sortie ? Photo : Michelin Motorsport

 

Photo de couverture : Michelin Motorsport

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