pub

En MotoGP, il est fréquent d’entendre les passionnés mettre en cause l’impartialité des instances dirigeantes, en particulier de la Dorna, mais non, cela ne se passe pas comme vous le pensez !

Qui n’a jamais entendu, voire prononcé, des phrases comme  « C’est normal, Márquez est espagnol, comme la Dorna » ou « Il a à peine touché le vert, la Direction de course l’a pénalisé pour rien ! » ?
S’en suivent généralement des discussions à n’en plus finir incriminant les instances dirigeantes, Dorna, FIM, IRTA, mais aussi les marques ou les teams dominateurs, voire les sponsors importants qui donnent des ailes, nous rapprochant ainsi dangereusement des théories du complot…

Pour tenter d’éclairer le fonctionnement des Grands Prix et l’incroyablement complexe organisation que ceux-ci nécessitent, nous nous sommes introduits pour vous dans certains des lieux les plus sensibles, lors du dernier Grands Prix à Valence.

Concernant le déroulement d’une séance ou d’une course, les plus sensibles sont les deux salles qui s’assurent du bon déroulement de celle-ci. Oui, deux, car il ne faut pas mélanger les torchons et les serviettes, en l’occurrence la Direction de course qui s’assure principalement de la sécurité en piste, contrairement à ceux qui, sous la direction de Freddie Spencer, sont là pour sanctionner les infractions…

Accédez à la Direction de course ici


2/ Les Commissaires FIM MotoGP

Qui est dans la salle des Commissaires FIM MotoGP ?
Un étage plus haut, la deuxième salle est isolée, ce qui permet aux commissaires FIM MotoGP d’être totalement indépendants et ne pas être sous l’influence de personnes comme Loris Capirossi et Franco Uncini, d’anciens pilotes travaillant maintenant pour Dorna Sports et la FIM, et qui pourraient pousser à sanctionner les pilotes au nom de la sécurité et au détriment des actions de course. Les personnes qui travaillent dans cette salle sont donc
totalement indépendantes dans leur prise de décision. Les éventuelles sanctions sont décidées ici selon un barème préétabli, puis transmises à la salle de la Direction de course qui fait simplement appliquer les pénalités.

Concrètement, Andrés Somolinos et Tamara Matko représentent en permanence la FIM, Freddie Spencer l’IRTA avec le rôle de Président des commissaires. Il n’y a donc aucun représentant Dorna dans cette salle, et même si Tamara Matko est la compagne de Bartolome Alfonso Ezpeleta, cela fait plus qu’envoyer aux oubliettes les suspicions de décisions prises par favoritisme…

Pour l’anecdote, Andrés Somolinos est la personne qui a développé le Championnat d’Espagne de Vitesse, devenu par la suite le CEV puis le JuniorGP. Il connaît donc quasiment tous les pilotes espagnols depuis qu’ils sont tout gamins, et ceux-ci ont un profond respect de sa personne et de ses décisions.

Plus curieusement, Freddie Spencer sert de paratonnerre aux critiques, car si celles-ci ne lui sont pas épargnées, l’ancien pilote déteste pénaliser !
Héritage d’une autre époque, pour lui toute action « virile » est un simple fait de course, et seul le triste spectacle des pilotes attendant sur la piste de pouvoir prendre une roue trouve grâce à ses yeux pour une sanction. Là encore, réalité et discussions de bistrot sont un peu aux antipodes…

Quel est le travail des Commissaires FIM MotoGP ?
Heureusement pour les uns, malheureusement pour les autres, les « faits de course » sont relativement rares, et l’essentiel du travail consiste aujourd’hui à s’assurer que les débats aient bien lieu sur la piste autorisée, c’est à dire sur l’asphalte et sur les vibreurs. Ces derniers sont progressivement remplacés par les récents « Misano 200 » qui, en faisant perdre du temps aux pilotes, ne les incitent plus à rouler dessus. C’est d’ailleurs pour cela qu’à Valence, vous avez pu voir aux essais de très nombreux pilotes sortir dans le vert au virage #1 : ayant roulé sur le vibreur Misano 200 à l’extérieur, ils savaient que de toute façon leur tour était perdu !

Pour détecter les intrusions dans vert est déroulé quasiment à chaque virage un flexible, avec un cable palpeur dedans, qui déclenche et enregistre trois ou quatre caméras tout en déclenchant une alerte dans un tableau. Après avoir visionné les enregistrements, les commissaires rendent leur décision en fonction de l’importance de l’infraction (amélioration du chrono ou pas, gêne d’un pilote, etc.).

Jusqu’à la mise en place de ce dispositif, il y avait jusqu’à 2000 infractions par week-end à juger en direct et « à l’œil »… Autant dire qu’on passait à côté de beaucoup et que les erreurs devaient être fréquentes !

Maintenant, pour ne rien rater, Freddie Spencer et ses assistants disposent d’un outil magique, un opérateur avec un super joystick contrôlant toutes les caméras de Dorna et les caméras internes du circuit. A Valence, cela signifiait pas moins de 69 caméras ! On y reviendra…

Parallèlement à la mise en place de ce dispositif, toutes les motos sont maintenant équipées avec de nouveaux transpondeurs GPS qui permettent de les suivre en temps réel sur la piste. Auparavant, entre deux points de contrôle (des boucles dans le bitume), il s’agissait d’une estimation de leur position (comme sur Waze dans les tunnels), et il arrivait parfois qu’une moto chutait mais qu’on la voyait continuer sur le tracé électronique du circuit. Maintenant, son avatar signale vraiment sa position réelle.

Vibreurs, détection des sorties de piste, électronique, tout cela montre bien que l’amélioration des outils est constante, toujours au nom d’une plus grande efficacité et sécurité. 

C’est également dans cette salle que viennent de plus en plus souvent les représentants des teams pour réclamer une pénalité contre des adversaires, une démarche bien loin des caméras qui a tendance à s’amplifier et qu’il n’est pas la plus belle partie des Grands Prix…

Comment est l’ambiance dans la salle ?
Là, l’ambiance est complètement différente de la première salle. Tout le monde est sur le qui-vive, la plupart des personnes étant occupées surveiller les sorties de piste. Mais nous avons eu la « chance » d’être présent dans cette salle quand un incident est survenu. En l’occurrence, il s’agissait de l’accrochage, dans les derniers instants de la qualification Moto3, entre Filippo Farioli (Red Bull KTM Tech3) et Ryusei Yamanaka (GasGas Aspar Team) , entraînant les deux pilotes au sol.

Après s’être assuré que les deux fougueux espoirs étaient debout, les drapeaux jaunes étant de mise une partie des personnes s’attèlent à la tâche de vérifier que les chronos sont plus lents qu’au tour précédent.

Mais pendant ce temps Freddie Spencer, lui, penché en avant devant son écran, est totalement concentré pour savoir ce qu’il s’est exactement passé…

Après une dizaine d’arrêts sur image, de marches avant, de marches arrière, pendant plusieurs minutes où l’opérateur « joystick 69 » est vraiment mis à rude épreuve, l’ancien pilote qui s’est forgé son intime conviction revient dans notre monde et se retourne vers ses collègues pour déclarer en riant « c’est lui qui fait la faute et c’est lui qui insulte l’autre ».

Après cette analyse poussée des images, il s’avère en effet que l’Italien a commencé à déraper quelques fractions de seconde avant de percuter le Japonais, mais cela sera considéré comme un simple fait de course par « Fast Freddie ».
Dans le cas contraire, la sanction établie dans cette salle aurait été transmise à la direction de course pour un affichage aussi rapide que possible sur le bandeau défilant en bas du flux diffusé sur nos écrans.

On le voit, la Dorna n’a donc pas grand-chose à voir avec les différentes sanctions infligées aux pilotes et ne privilégie aucunement tel pilote ou tel team. Désolé pour les adeptes de la théorie du complot… 🙂